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Photo du rédacteurHéloïse Leclerc

Savoir goûter: le secret des chefs

Dernière mise à jour : 6 févr. 2020

Les émissions et les compétitions de cuisine martèlent toujours le même message aux cuisiniers, qu'ils soient amateurs ou professionnels: un plat réussi passe par le fait d'y goûter. Mais est-ce si simple que ça? Sans doute que non, puisque les cuisiniers passent des années à entraîner leur palais avant d'accéder au rôle de chef, celui dont le jugement prévaut en cuisine. Quand goûter? Comment goûter? Quelles informations doit-on tirer de la dégustation? C'est le sujet de mon billet du jour!


De passage au festival Rythmes & Papilles samedi dernier afin d'y animer mon nouvel atelier "La magie des saveurs", j'ai échangé pendant quelques minutes avec une participante qui se plaignait de manquer de goût. "Je ne sais pas si j'ai moins de papilles, mais il me semble que quand je goûte un vin et qu'on me demande ce que j'en pense, la réponse ne me vient pas spontanément... Je dois réfléchir, alors que certains de mes amis commentent les notes de fruits dès la première gorgée...", m'a-t-elle racontée sur le ton de la confidence.


C'est vrai, nous n'avons pas tous exactement le même bagage génétique, donc il nous est impossible de percevoir exactement la même chose, mais le premier élément qu'il faut éclaircir, c'est qu'il y a une grosse différence entre manger à tous les jours et comprendre ce que l'on goûte. Pour mettre des mots sur nos perceptions des saveurs, ça prend trois choses:

  1. Une compréhension des éléments constituants des saveurs: les goûts - bien sûr -, mais aussi, les arômes, les textures et tous les autres facteurs qui influencent leur perception (la vue, l'ouïe, mais aussi, des facteurs sociétaux comme la culture.)

  2. Une approche analytique pour percevoir chacun de ces éléments isolément, et ensemble. Ceci nécessite une exposition systématique et, souvent, répétée.

  3. Du vocabulaire adapté afin d'être capable de coder, enregistrer et communiquer des impressions.

Si vous avez de la difficulté à décrire ce que vous goûtez, il est possible qu'il vous manque simplement certains de ces outils et c'est tout à fait normal, puisqu'on ne nous apprend jamais ça, à moins de suivre des cours spécialisés.


Quand goûter quand on cuisine?


Souvent! En fait, plus souvent que vous ne le pensez!


  1. Avant de cuisiner. Incroyable mais vrai! Vous gagnez absolument à tester, lorsque possible, les aliments susceptibles de présenter une variation de saveur. Si votre sel de table a un goût constant, plusieurs fruits, légumes et fines herbes varient tout au long de l'année et selon les variétés. Une carotte "à cheval" n'a pas du tout le même goût qu'un carotte de jardin l'été et cela devrait influencer votre traitement de cet ingrédient tout au long de l'exécution de votre recette.

  2. Après une cuisson, avant de rajouter des ingrédients! Ceci est particulière vrai des sauces, bouillons et réductions, pour lesquels le sel ne devrait jamais être ajouté en début de cuisson, puisque l'évaporation concentre les saveurs et risque de mener à un produit fini trop salé.

  3. Après chaque ajout de condiment et d'aromate! Si un cuisiner professionnel bien entraîné connaît l'impact précis d'une pincée d'origan ou d'un trait de sauce Sriracha dans sa préparation, vous gagnez à aromatiser vos créations en ajoutant un seul produit à la fois et en goûtant entre chaque ajout.

  4. Avant de servir! Si un certain laps de temps s'est écoulé entre la préparation et le service, si la température a été modifiée, si le produit a été réchauffé, les saveurs peuvent s'être transformées. Parfois, c'est positif. D'autres fois, il faut ajuster à nouveau.

Comment goûter?


Avec une cuillère, bien sûr... Mais comme vous vous en doutez, la réponse n'est pas si simple! 🤣 Pour bien goûter, il faut adopter une approche multi-sensorielle!


  1. Regarder! La vue fournit des indications importantes sur la fraîcheur et la texture attendue d'une préparation.

  2. Sentir! Avant même de prendre une première bouchée, mais aussi, en laissant l'air circuler dans vos voies respiratoires pendant la dégustation. Une portion importante des arômes parvient à vos récepteurs olfactifs par les voies "rétro-nasales."

  3. Bien mâcher! Les molécules aromatiques et celles responsables des goûts sont emprisonnées dans les aliments. Pour les libérer, il est capital de bien les mâcher. Les molécules qui stimulent les récepteurs de goûts vont se dissoudre dans la salive, et ce n'est qu'ainsi qu'elles pourront pénétrer dans les papilles gustatives et déclencher la perception du goût.

  4. Anticiper les saveurs attendues avant de prendre une bouchée! Ensuite, il convient de comparer vos attentes à la réalité. Cet aller-retour peut sembler exigeant, mais c'est ainsi que vous allez développer une plus grande capacité à mentaliser les saveurs, le talent qui permet aux chefs d'exceller dans leur domaine.

  5. Boire de l'eau et rafraîchir sa bouche entre les dégustations!


Quelles informations doit-on retirer de la dégustation?


Même si c'est très agréable de goûter en cuisinant et que c'est bien correct de goûter juste pour le plaisir, ça vaut la peine de se rappeler pourquoi on goûte!


1- S'assurer du bon niveau d'assaisonnement! Le plat doit être correctement salé et relevé, sans quoi il sera nécessairement fade.


2- Détecter tout défaut de goût potentiel et le corriger! Trop salé, trop sucré, trop amer, trop acide? Pas de problème, il existe des solutions. En ayant identifié votre problème, vous êtes ensuite en mesure de le régler avant que votre plat n'arrive à table.


3- Rehausser les saveurs, au besoin. Si votre plat est correctement assaisonné, mais qu'il demeure "plate" en bouche, le fait de goûter à votre création avant le service vous permet d'apporter, ici aussi, les correctifs nécessaires.


4- Valider les autres éléments de l'expérience de saveurs, incluant la texture et la température. Par exemple, une purée devrait être lisse et servie chaude. Si elle est tiède ou granuleuse en bouche, à vous d'y remédier.


5- Tester la complémentarité de certains éléments. Si vous combinez plusieurs recettes ensemble, il est possible qu'elles s'harmonisent à merveille... ou pas. Si les divers éléments jurent, il vous est encore possible de trouver un "pont" afin de les aider à cohabiter dans la même assiette.


Ça prend certaines connaissances en cuisine pour être capable d'effectuer les ajustements requis par ces 5 opérations. C'est pour cela que j'ai conçu l'atelier-conférence interactif "Le secret des saveurs en cuisine." En 3 heures, j'accompagne les participants à travers une série de dégustations et d'exercices pratiques qui leur permettent d'acquérir les fondements de ces notions importantes. Ça vous intéresse? Je vous invite à visiter la section "Ateliers" de mon site afin de prendre connaissance des prochaines dates disponibles.



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