Au printemps 2019, j'ai conscaré quelques journées d'exploration culinaire à ma fleur préférée parmi toutes: le trop éphémère lilas. Son parfum suscite chez moi une nostalgie pour les plus beaux moment de mon enfance. Je me suis demandé comment saisir et transmettre son essence en forme comestible et j'ai partagé mes découvertes sur le compte Facebook de La Touche Héloïse. Afin d'immortaliser ces contenus, je transpose ici cette série de publications essentielles pour l'amateur de lilas en vous!
1- L'eau de lilas
Voici la manière la plus simple et la plus rafraîchissante de cuisiner le lilas: une infusion à froid! Il suffit de faire tremper des fleurs de lilas en pleine floraison dans de l'eau pendant 24 ou 48 heures. Cette méthode permet de contourner plusieurs écueils rencontrés avec d'autres recettes. Tout d'abord, l'arôme du lilas, bien que fragrant, est aussi délicat, donc facilement affecté par la transformation et la chaleur. Autre aspect important: la fleur de lilas est plutôt amère.
L'infusion à froid permet de faire passer doucement les molécules aromatiques du lilas au liquide sans transférer beaucoup d'amertume (l'infusion 48 heures est plus fragrante et plus amère, justement.)
En prime: les fleurs de lilas se conservent comme un charme dans cet environnement. Pour une présentation spectaculaire, ajoutez-les directement dans les verres au moment du service!
Le seul hic de cette astuce, c'est qu'elle permet de transposer en application culinaire les arômes du lilas à court terme seulement. Mon rêve serait de pouvoir les retrouver dans quelques mois, quand la saison de ma fleur préférée ne sera plus qu'un distant souvenir!
2- Le sirop de lilas
Après l'infusion à froid présentée ci-dessus, j'ai essayé l'infusion à chaud avec l'intention de conserver les arômes du lilas à plus long terme. J'ai choisi la piste d'un sirop simple (mélange de sucre et d'eau), amené à ébullition pendant quelques minutes. Les fleurs de lilas sont simplement déposés dans le liquide, infusées pendant 3 heures, puis le tout est filtré avec un tamis à mèches fines.
Malheureusement, les pigments colorants des lilas ne se transposent pas au sirop simple, alors j'ai triché en m'inspirant d'astuces en ligne: quelques bleuets surgelés de l'été dernier colorent mon mélange. J'aurais bien aimé essayé avec des mures ou des camerises de saison pour obtenir d'autres teintes, mais j'ai pris ce que j'avais sous la main.
Le résultat? Un sirop floral et légèrement amer, particulièrement agréable sur une glace à la vanille, dont le goût crémeux et sucré se marie très bien aux notes de fleurs. (Ça donne un goût un peu similaire au sorbet de Stéphane Modat à base de gomme savon, en plus sophistiqué, désolée mon cher 😉)
3- Le cordial de lilas et son lilas sour
Dans la famille des infusions à chaud, j'ai concocté mon premier "cordial". Si je place "cordial" entre "parenthèses", c'est que je n'arrive pas à lui trouver une définition unique. Selon la région, on le présente comme un mélange d'eau, de jus de fruits, de sucre et d'autres aromates, tantôt comme une boisson alcoolisée (un genre de synonyme de liqueur.) J'ai même vu certains articles en ligne qui évoquaient une effervescence naturelle, issue de la fermentation.
Dans mon cas, j'ai fait macérer dans un mélange d'eau et de sucre amené à ébullition une bonne quantité de fleurs de lilas et des quartiers de citron pendant 4 jours. Le résultat n'est ni effervescent, ni alcoolisé - que je sache - mais très goûteux, par contre (à la fois sucré, acidulé, floral et un brin amer). Comme pour le sirop simple au lilas, j'ai ajouté quelques bleuets à la préparation afin de lui donner une couleur appétissante.
Pas destiné à être bu tel quel, mais plutôt, mélangé avec de l'alcool et des allongeurs, j'ai improvisé avec mon cordial un lilas sour à base de gin, du sirop de lilas d'hier présenté plus haut et de blanc d’œuf. Le résultat est à la hauteur des plus belles cartes cocktail en ville! Je pourrais aussi très bien l'imaginer mixé avec un soda pour en faire un rafraîchissant mocktail.
4- La crème fouettée au lilas
Quelques jours dans l'année - on les compte sur les doigts de la main! - les astres s'alignent et le printemps nous offre la symphonie Lilas & Fraises!
Afin de célébrer cette rencontre, j'ai infusé des fleurs de lilas à froid dans une crème 35%. La matière grasse capture exceptionnellement bien les notes florales, tandis que le sucre ajouté à la chantilly évoque son doux parfum en cajolant les papilles. Définitivement mon plus gros coup de cœur de cette série consacrée au lilas!
Curieuse de savoir si je pourrais reconduire cet arôme par-delà la saison du lilas, j'ai fait congeler une partie de la crème infusée et je l'ai décongelée et fouettée 6 semaines plus tard. En dépit d'une certaine perte aromatique (autour de 25% je dirais), les arômes résiduels justifient l'opération. L'an prochain, je me donnerai le défi de "sur-infuser" la crème avec deux lots successifs de fleurs afin de tenter de préserver un maximum de parfum en dépit de la congélation.
À propos des essais qui ont mal viré
Pour ceux que ça pourrait intéresser, sachez que mes expérimentations n'ont pas toutes été couronnées de bons résultats...
Le sucre aromatisé au lilas! Malgré mes nombreux essais, mes fleurs brunissent bien avant d'avoir conféré un arôme intéressant au sucre. Plusieurs personnes m'ont dit avoir réussi cette technique, mais j'en viens à me demander si ce n'est pas mon niveau d'exigences par rapport à la préservation des notes aromatiques qui est en cause. Si je compare le sucre à la crème infusée, la perte est trop grande pour m'en satisfaire.
Les fleurs séchées en vue d'être pulvérisées dans du sucre: idem. Avec la méthode de l'herbier (fleurs pressées entre de feuilles de papier absorbant sous des poids) les fleurs ont bruni et perdu beaucoup de parfum. Je n'ai pas le goût de les cuisiner à ce stade-ci. Je prévois tenter de nouveaux tests l'an prochain avec un déshydrateur, car j'aimerais bien en faire l'acquisition.
Fleurs cristallisées: quelle aventure ce fut! J'ai tenté plusieurs recettes trouvées en ligne, qui s'appliquent habituellement sur des pétales de rose. En raison de la forme et de la taille de la fleur de lilas, je ne trouve pas qu'elles sont transposables. Mon plus grand succès a été le plus inattendu: tremper les fleurs ou de petites grappes de fleurs dans du blanc d’œuf fouetté seulement (sans ajout de sucre). Ce dernier crée une barrière protectrice qui préserve la forme, la couleur et l'arôme, tout en donnant à la fleur une texture croquante. Dans ces circonstances, je ne pense pas qu'on puisse parler de fleurs cristallisées, ni même que la procédure soit très MAPAQ. 🤣
Fleurs crues, en salade: bof. Comme je l'ai noté très souvent en cours de cette série, le lilas est très amer, avec un arrière goût de savon. En ce qui me concerne, la parcimonie est de mise!
J'espère que vous avez aimé cette série autant que moi! Vous aimeriez que je traite d'un ingrédient avec la même intensité? Lancez-moi votre idée! Qui sait ce qui pourrait arriver? #latoucheloise
Bonjour Heloise,
Je tiens le blog French Frimousse pour lequel j'ai fait des essais similaires avec la violette, bien que je me sois mise la pression supplémentaire de n'utiliser que peu voire pas de sucre. J'avais pensé faire un beurre à la violette, type beurre lavande, infusé à froid - très décevant. J'ai aussi fait de l'oxymel mais le gout a été complètement noyé pas le vinaigre et la fermentation. Est-ce que tu as de l'experience (au delà du sirop) avec cette fleur subtile?
Bises,
Mme Frimousse